Catégorie : Réponses à vos questions

Dimanche 13 novembre 2022 – Rencontre Bêta de 15h30 à 17h « Dieu qui pardonne peut-il juger ? »

Le Dieu qui pardonne est tellement mis en avant dans la prédication qu’on pourrait penser qu’il a remplacé l’ancien Dieu, le juge des jansénistes et des scrupuleux. L’heure serait à la liberté, à l’amour et à la miséricorde. On finit même par se dire que le jugement ne peut pas faire partie de l’amour, lequel comprend tout, supporte tout, ne voit pas le mal, accueille inconditionnellement.
Or le jugement, le purgatoire et l’enfer font partie de la révélation, Jésus lui-même l’évoque dans sa prédication et l’explique en paraboles. Ainsi, entre jugement et miséricorde, il n’y a pas d’opposition, tout est affaire d’équilibre.

Vous pouvez adresser vos questions au frère Dominique-Joseph en remplissant ce formulaire : https://fsj.fr/fsj/cycle-beta-2211/

Prochaines rencontres : 11 décembre 22 et 22 janvier 23

KTQ-Le Dieu de Jésus-Christ (5)

Résumons notre foi à sa plus stricte expression : « Je crois en Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, qui me révèle le visage de Dieu son Père, devenu mon Père par le don de l’Esprit Saint ».

Nous croyons qu’en Jésus-Christ, Dieu lui-même s’est approché de nous, nous a révélé son visage ; qu’en lui s’accomplissent les paroles des prophètes ; qu’il est dans toute sa Personne, la plénitude de la révélation, en qui Dieu se donne, pour que nous puissions devenir ses enfants d’adoption.

Accueillir Jésus dans la foi, c’est accueillir Dieu lui-même :

Jn 14,9 : « Celui qui m’a vu a vu le Père. »

Le verbe « voir » dans le quatrième Evangile désigne une connaissance intime, une communion de vie, une inhabitation réciproque :

Jn 15,4 : « Demeurez en moi, comme moi en vous. »

Dieu se fait homme pour que l’homme puisse devenir « participant de la nature divine » (2 P 1,4).

Sommes-nous bien conscients du scandale de l’Incarnation ?

Affirmer que Dieu, l’Infini, l’Eternel, s’abaisse jusqu’à se faire minuscule fœtus dans le sein de la Vierge Marie, qu’il entre dans le temps et se soumet aux vicissitudes du devenir humain, n’est-ce pas blasphématoire ?

Si nous nous référons à la conception d’un Dieu tout-puissant, retiré dans sa transcendance, certes, l’Incarnation semble irrespectueuse de la différence ontologique.

Mais si nous nous en tenons à la « définition » de Dieu que nous donne St Jean, « Dieu est charité » (1 Jn 4,8) – agapé, c’est-à-dire amour-don, totalement gratuit – alors nous pressentons que l’Incarnation est une exigence de l’Amour, qui veut se faire proche, partager les joies et les peines, la vie et la mort des hommes créés à son image et à sa ressemblance :

Ph 2, 5-7 : « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. »

…pour enseigner aux hommes le chemin vers Dieu :

Jn 14,6 : « Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi. »

 

Lc 10,22 : « Tout m’a été remis par mon Père. Personne ne connaît qui est le Fils, sinon le Père ; et personne ne connaît qui est le Père, sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler. »

Par tout ce qu’il est – c’est-à-dire ce qu’il dit, ce qu’il fait, ses actions, omissions, réactions… – Jésus nous révèle le vrai visage du Dieu d’amour :

1 Jn 4, 9-10 : « Voici comment l’amour de Dieu s’est manifesté parmi nous : Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde pour que nous vivions par lui. Voici en quoi consiste l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son Fils en sacrifice de pardon pour nos péchés. »

La conséquence suit logiquement :

1 Jn 4, 11-13 : « Bien-aimés, puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres. Dieu, personne ne l’a jamais vu. Mais si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et, en nous, son amour atteint la perfection. Voici comment nous reconnaissons que nous demeurons en lui et lui en nous : il nous a donné part à son Esprit. »

A ceux qui croient en son Fils Jésus-Christ, Dieu donne part à l’Esprit d’amour qui nous permet de vivre de sa propre vie, et de devenir ainsi enfants de Dieu :

1 Jn 3,1 : « Voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. »

C’est pourquoi Jésus enseigne à ses disciples d’oser s’adresser à Dieu en l’appelant « Père » :

Mt 6, 9-13 : « Vous donc, priez ainsi : Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour.  Remets-nous nos dettes, comme nous-mêmes nous remettons leurs dettes à nos débiteurs. Et ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre-nous du Mal. »

Si nous pouvons appeler Dieu notre Père, c’est donc que par la foi, nous avons accès à une vie nouvelle qui vient de lui, ou pour le dire autrement : nous sommes « born again » (nés à nouveau) :

1 P 1,23 : « Dieu vous a fait renaître, non pas d’une semence périssable, mais d’une semence impérissable : sa parole vivante qui demeure. »

 

Jn 1, 12-13 : « A tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. Ils ne sont pas nés du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu. »

C’est cette nouvelle naissance que Jésus annonçait à Nicodème :

Jn 3,5 : « Amen, amen, je te le dis : personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair ; ce qui est né de l’Esprit est esprit. »

Le baptême sacramentel est précisément pour chacun de nous cette nouvelle naissance à la vie divine dans l’Esprit.

Q/R-Le pardon

La question nous concerne tous : « Peut-on vraiment penser que le pardon est total lorsqu’on garde en mémoire les agissements passés de « l’autre » et que l’on adapte notre comportement, en prenant nos distances par exemple ?« .

Il est difficile d’effacer de notre mémoire les agissements des personnes, en particulier ceux qui nous ont fait souffrir. La question est plutôt : comment est-ce que je réagis à cette souffrance qui se réveille au souvenir de ce que j’ai vécu ?

Si, avec l’aide de la grâce, j’ai vraiment pardonné, alors la personne qui m’a fait du tort n’est plus un « ennemi » (non-ami), mais par la force du pardon (forme suprême de l’amour), elle est devenue tout au contraire l’objet d’un amour de prédilection. Je l’aime non pas malgré ce qu’elle m’a fait, mais en raison de ce qu’elle m’a fait, car seul l’amour peut désarmer le mal :

« Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5, 43-45).

Logiquement je ne vais donc pas fuir cette personne, mais au contraire lui manifester tout particulièrement mon amitié.

Telle est bien l’attitude préconisée par Jésus, lui qui disait :

« Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » (Mc 2,17).

Ou pour le dire avec les paroles de St Paul aux Romains :

« Alors que nous n’étions encore capables de rien, le Christ, au temps fixé par Dieu, est mort pour les impies que nous étions. Accepter de mourir pour un homme juste, c’est déjà difficile ; peut-être quelqu’un s’exposerait-il à mourir pour un homme de bien. Or, la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs » (Rm 5, 6-8).

Faut-il insister sur le fait que par nous-mêmes, nous sommes incapables d’adopter une telle attitude ? Seule la grâce divine peut accomplir en nous une telle conversion à l’amour…

Q/R-Quel sens donner aux chiffres dans la Bible ?

Pour répondre à cette question, nous reproduisons un article du Père Jérôme Martineau, bibliste canadien, ancien directeur de la revue Notre-Dame du Cap, désormais directeur d’une communauté de l’Arche au Québec. Cet article est paru sur le site Interbible.org.

Lorsque nous lisons dans le journal qu’un homme est mort à 38 ans, ou qu’un incendie a ravagé un immeuble de 7 étages, nul d’entre nous n’éprouve de doute concernant la signification de ces chiffres.  Ils expriment avec précision l’âge de cet homme et le nombre d’étages que comportait cet immeuble.  Par contre, si nous lisons dans l’évangile que Jésus a guéri un homme malade depuis 38 ans ou qu’on recueillit 7 corbeilles de morceaux, après la multiplication des pains, les choses sont un peu différentes.  Ici, nous ne sommes plus tellement sûrs que les chiffres correspondent vraiment au nombre d’années durant lesquelles l’homme a été malade, ou à la quantité de corbeilles de pain, ramassées ce jour-là.

     C’est que, pour nous, le chiffre a une signification bien différente de celle qu’il revêtait pour les Orientaux de l’antiquité.  Alors que nous l’utilisons normalement pour préciser la quantité, le chiffre, dans la mentalité biblique, peut désigner trois réalités nettement distinctes, à savoir : la quantité, le symbole et le message gématrique.

Le sens quantitatif

     Le sens premier du chiffre, dans la Bible, est celui des quantités.  En cela, il ne diffère pas de celui auquel nous nous référons couramment. La Bible nous dit, par exemple, que le prophète Élie prédit une sécheresse de 3 ans en Israël, que le roi Josias régna 31 ans à Jérusalem, que Salomon nomma 12 préfets, chargés, chacun durant un mois, d’approvisionner le palais, que Béthanie, le bourg où Jésus ressuscita Lazare, est situé à une distance de 15 stades (3 km), de Jérusalem.  Il est évident qu’ici, aucun de ces chiffres n’a un sens symbolique ou une valeur de message.  Tous se réfèrent purement et simplement au nombre d’années et de personnes, ou à la distance dont il est question dans le texte.

     On peut trouver dans la Bible, bien d’autres chiffres qui, comme ceux-ci, sont utilisés pour nous fournir des informations et des données historiques concrètes, et qui servent uniquement à préciser la quantité.  Pas de confusion possible à ce sujet : ce que dit le chiffre est exactement ce que l’auteur lui-même veut dire.

Le sens symbolique

     Cependant, les chiffres bibliques peuvent avoir un deuxième sens : le sens symbolique.  Un chiffre symbolique est celui qui exprime, non pas une quantité, mais une idée, un message distinct de lui, qui le dépasse et le déborde.

     Il n’est pas toujours possible de savoir pourquoi tel chiffre signifie telle chose.  L’association qui est faite d’une réalité avec l’autre est parfois incompréhensible.  C’est pourquoi ces chiffres ne peuvent être dits rationnels et restent difficiles à interpréter pour nous, occidentaux, prisonniers de la logique.  Mais les Sémites, eux, s’en servent tout naturellement pour transmettre des idées, des messages ou des clefs.

     Bien que la Bible n’explique jamais ce que symbolise chacun des chiffres, les spécialistes ont réussi à découvrir certaines de leurs significations symboliques et ont pu ainsi éclairer de nombreux épisodes bibliques qui, du coup, sont devenus plus compréhensibles.

La valeur symbolique de 1, 2, 3, 4 et 5

Le chiffre 1 symbolise Dieu, qui est unique.  Pour cette raison, il sert à exprimer l’exclusivité, la primauté, l’excellence.  Ainsi quand Jésus répond au jeune homme riche : « Qu’as-tu à m’interroger sur ce qui est bon? Un (1) seul est le Bon. » (Mt 19, 17  Ou encore, quand il dit : « Le Père et moi, nous sommes un (1) » (Jn 10,30).  De même, quand saint Paul déclare : « Il n’y a qu’un (1) seul Seigneur, une (1) seule foi, un (1) seul baptême, un (1) seul Dieu » (Eph 4,5).  Dans tous ces cas, le chiffre 1 symbolise l’environnement divin.

Par contre, le chiffre 2 représente l’homme, en qui il existe toujours une dualité, une division intérieure, conséquence du péché.  Et cela permet de résoudre certaines énigmes contenues dans l’Évangile.  Par exemple, à Jéricho, selon Marc, un seul aveugle, nommé Bartimée, est guéri ; selon saint Matthieu, il y avait 2 aveugles.  Au cours du procès de Jésus, quelques faux témoins se présentèrent, nous dit Marc ; Matthieu, quant à lui, affirme qu’il s’en présenta 2.  Qui dit la vérité?  Tous les deux.  En effet, Marc nous livre la version historique des faits et Matthieu recourt au chiffre symbolique.

Le chiffre 3 exprime la totalité, sans doute parce qu’il y a 3 dimensions du temps : le passé, le présent et l’avenir.  Dire 3 équivaut à dire « la totalité » ou « toujours ».  Ainsi, les 3 fils de Noé représentent la totalité de ses descendants.  Les 3 fois où Pierre renia Jésus symbolisent toutes les fois où Pierre a été infidèle à son Maître.  Les 3 tentations que Jésus subit de la part du diable, représentent toutes les tentations auxquelles il dut faire face, au cours de son existence terrestre.  Et quand l’Ancien Testament appelle Dieu le 3 fois saint, c’est pour signifier qu’il possède la plénitude de la sainteté.

Le chiffre 4, dans la Bible, symbolise le cosmos, le monde, vu qu’il existe 4 points cardinaux.  Aussi, quand on y lit que 4 fleuves arrosaient le jardin d’Eden, cela signifie qu’avant le péché d’Adam et d’Eve, tout le cosmos était un paradis.  Autrement dit, il ne s’agit pas ici d’un endroit déterminé, comme le pensent certains qui continuent à chercher l’Eden quelque part en Orient.  Et quand Ezéchiel demande à l’Esprit de venir des 4 vents pour souffler sur les ossements desséchés, cela ne signifie pas qu’il existe que 4 vents, mais qu’il est fait appel à tous les vents du monde entier.  De même, lorsque l’auteur de l’Apocalypse parle du trône de Dieu, entouré de 4 vivants, il veut dire que Dieu domine le monde et que la Terre toute entière est son trône.

     Le chiffre 5 signifie « quelques-uns », un « certain nombre », une quantité indéterminée.  Ainsi, nous dit-on que Jésus, lors de la multiplication des pains, prend 5 pains (quelques pains); que sur le marché, 5 moineaux (quelques moineaux) se vendent deux sous ; qu’Élizabeth, la mère de Jean-Baptiste, après avoir conçu, se tient cachée dans sa maison durant 5 mois (quelques mois); que la Samaritaine du puits de Jacob avait eu 5 maris (plusieurs maris).  Maintes fois, dans ses paraboles, Jésus emploie le chiffre 5 en lui donnant ce sens indéterminé : les 5 vierges sages et les 5 vierges imprévoyantes, les 5 talents, les 5 paires de boeufs achetés par des invités au banquet, les 5 frères du riche Sybarite.  Et saint Paul, parlant du don des langues, déclare : « Je préfère dire 5 mots (quelques mots) pour instruire les autres que 10 000 en langues ».

La valeur symbolique de 7, le 10 et le 12

Le chiffre 7 a une signification symbolique bien connue de tous.  Il représente la perfection.  C’est pourquoi Jésus dira à Pierre qu’il doit pardonner à son frère jusqu’à 70 fois.  Ce chiffre peut aussi désigner la perfection dans le mal, ou le mal suprême, comme c’est le cas lorsque Jésus enseigne que, si un esprit immonde sort d’un homme, il peut revenir avec 7 autres esprits plus mauvais, ou quand l’Évangile nous apprend que le Seigneur a délivré Magdeleine de 7 démons.

Étant donné qu’il exprime la perfection, ce chiffre apparaît très souvent en relation avec les choses de Dieu.  L’auteur de l’Apocalypse est celui qui y recourt le plus fréquemment : 54 fois, pour décrire symboliquement des réalités divines : les 7 Églises d’Asie, les 7 esprits autour du trône de Dieu, les 7 trompettes, les 7 candélabres, les 7 cornes et les 7 yeux de l’agneau, les 7 tonnerres, les 7 plaies, les 7 coupes déversées.  Nombreux sont ceux qui font erreur, en voyant dans ce chiffre l’expression d’une quantité ou d’un temps réel.

La Tradition chrétienne est restée fidèle à ce symbolisme, en fixant à 7 le nombre de sacrements, des dons du Saint Esprit et des vertus.

Le nombre 10, pour sa part, a une valeur mnémotechnique; en effet, il est facile de se le rappeler, en se référant aux 10 doigts de la main.  C’est ce qui explique qu’on trouve 10 commandements donnés par Dieu à Moïse (peut-être furent-ils plus nombreux), et 10 plaies qui affligèrent l’Egypte.  Pour cette raison, on ne relève que 10 ancêtres entre Adam et Noé, et 10 entre Noé et Abraham, alors que nous savons qu’il y en eut bien davantage.

     Un autre nombre symbolique est le nombre 12.  Il sert à exprimer l’élection.  Ainsi parlera-t-on des 12 tribus d’Israël, bien qu’en fait l’Ancien Testament en signale plus de 12; mais ce qu’on veut signifier, c’est que ces tribus sont élues.  De même, on ramène à 12 le nombre des prophètes mineurs de l’Ancien Testament.  L’Évangile, à son tour, mentionne 12 apôtres de Jésus et les nomme Les Douze, parce qu’ils sont les élus du Seigneur.  On lit également que Jésus assure de tenir à sa disposition 12 légions d’anges.  L’Apocalypse, quant à elle, parlera des 12 étoiles qui couronnent la Femme, des 12 portes de la Jérusalem céleste, des 12 anges et des 12 fruits de l’arbre de Vie.

Autres nombres porteurs de messages

Le nombre 40 a, lui aussi, une valeur symbolique : il représente le remplacement d’une période par une autre ou les années qui constituent la durée d’une génération.  Ainsi le Déluge se prolonge pendant 40 jours et 40 nuits c’est-à-dire le temps du passage à une humanité nouvelle.  Les Israélites séjournent 40 ans dans le désert, le temps nécessaire pour que la génération infidèle soit remplacée par une autre, nouvelle.   Moïse reste 40 jours sur le mont Sinaï et Elie marche durant 40 jours pour y parvenir le temps au terme duquel leurs vies seront modifiées.  Le prophète Jonas passe 40 jours à annoncer la destruction de Ninive afin de donner aux habitants le temps de changer de vie.  Jésus jeûnera 40 jours pour marquer son passage de la vie privée à la vie publique.

Quant au nombre 1000, il désigne une grande quantité, une multitude.  Dans le livre de Daniel, on nous apprend que le roi Balthazar organisa une grande fête, à laquelle prirent part 1000 invités.  Le psaume 90 assure que, pour Dieu, 1000 de nos années sont comme un jour.  Salomon à Gabaon offre 1000 holocaustes et son harem se compose de  1000 femmes.

Parfois ce nombre entre en combinaison avec d’autres.  C’est le cas dans l’Apocalypse, où il est dit qu’à la fin du monde, 144 000 personnes seront sauvées.  Ce nombre résulte de la combinaison suivante : 12 x 12 x 1000, c’est-à-dire, les élus de l’Ancien Testament 12, les élus du Nouveau 12 et la multitude 1000 pour un total de 144 000.

Enfin, on rencontre quelques autres nombres qui ont un sens symbolique mais à un degré moindre.  Par exemple, quand Luc nous dit que Jésus désigne 70 disciples pour les envoyer dans toutes les villes et localités où lui-même devait se rendre, il ne s’agit pas d’un nombre réel mais symbolique, car, selon la Genèse, la somme totale des peuples et nations répartis dans le monde s’élevait à 70.  Luc, homme de mentalité universaliste, en affirmant que Jésus envoya 70 missionnaires, veut simplement dire qu’il leur confie le soin de faire parvenir l’évangile à toutes les nations du monde.

Saint Jean, lui aussi, transmet un message, lorsqu’il nous raconte qu’à l’occasion de la pêche miraculeuse, les apôtres récoltèrent 153 poissons.  Pourquoi tant de soin à noter ce détail sans importance?  Une possibilité est que, dans l’antiquité et dans le milieu de la pêche, on croyait que les mers étaient peuplées de 153 espèces de poissons.  Pour les lecteurs, le message est clair : Jésus est venu pour sauver les hommes de toutes les nations, de toutes les races et de tous les peuples du monde.

Tous les nombres bibliques n’ont cependant pas une valeur symbolique.  Pour chacun d’entre eux, il convient de se demander : ce nombre indique-t-il une quantité ou renferme-t-il un message ?

     Ainsi quand nous lisons que 4 hommes amenèrent le paralytique étendu sur une civière, il est évident que le chiffre 4 n’est pas symbolique, mais traduit une réalité : la civière avec 4 poignées, ce qui était le moyen le plus pratique pour la transporter.  De même, quand il est dit que Paul s’embarqua à Philippes et parvint à Troas 5 jours plus tard, nous ne devons pas voir dans le chiffre 5 un symbole; en effet, à l’époque, c’était bien le temps requis pour effectuer le voyage entre ces deux villes.

Le sens gématrique : un alphabet pour compter

En plus du sens quantitatif et symbolique, le troisième sens qu’un nombre peut avoir dans la Bible est le sens « gématrique ».  Qu’est-ce que cela veut dire? C’est là une particularité des langues hébraïque et grecque. Alors que chez nous on utilise certains signes pour représenter les chiffres (1,2,3) et d’autres signes pour représenter les lettres (a,b,c), l’hébreu et le grec recourent aux lettres mêmes de l’alphabet pour désigner les chiffres. Ainsi, le 1 est la lettre a, le 2 la lettre b, etc.  De sorte qu’avec les lettres d’un mot, quel qu’il soit, on peut toujours former un nombre.  Le nombre ainsi obtenu est qualifié de gématrique.  Cette possibilité qu’offrent les langues bibliques, donne lieu à des jeux ingénieux et des passe-temps originaux, du fait que chaque nombre peut cacher un mot. La Bible fournit maints exemples de ces jeux.

Ainsi, le chapitre 14 de la Genèse raconte l’invasion de la Palestine par quatre armées puissantes, venues de l’Orient, qui emmenèrent, comme prisonnier, Lot, neveu d’Abraham. Quand le patriarche en fut informé, il rassembla 318 hommes, se mit à la poursuite des ravisseurs et parvint à leur infliger une défaite et à libérer Lot. Fort bien. Mais comment imaginer qu’Abraham, ne disposant que de 318 hommes, ait vraiment pu vaincre les quatre puissantes armées de Mésopotamie? Il faut être naïf pour le croire. À moins que ce nombre n’ait une signification spéciale. Effectivement, nous savons qu’Abraham avait un serviteur nommé Eliézer, qu’il avait constitué héritier de tous ses biens. Si nous prenons les nombres qui correspondent aux lettres hébraïques de ce nom, nous obtenons : e=1 + l=30 + i=10 + e=70 + z=7 + r=200 = 318. Ce qui voudrait dire qu’Abraham partit combattre avec tous ses héritiers, et que ces héritiers, autrement dit les descendants du patriarche, triompheront toujours de leurs ennemis.

Le livre des Nombres nous fournit un autre exemple. Il nous raconte qu’à l’occasion de l’Exode, on vit sortir d’Egypte 603 550 hommes, sans compter les lévites, les vieillards, les femmes et les enfants. Si cela est vrai, il faudrait évaluer le nombre de ceux qui quittèrent l’Egypte à quelques trois millions de personnes. Un nombre exorbitant et qui probablement ne fut jamais atteint par la population d’Israël, au cours de toute son histoire. Mais si, aux lettres qui composent la phrase « tous les fils d’Israël », nous substituons les valeurs numériques correspondantes, nous obtenons précisément le nombre 603 550. En disant que 603 550 hommes sortirent, l’auteur entend affirmer que « tous les fils d’Israël » quittèrent l’Égypte.

Saint Matthieu se livre également à cette sorte de jeu. Il répartit les ancêtres de Jésus en trois séries de 14 générations chacune, et il conclut : « Le total des générations est donc : d’Abraham à David, 14 générations ; de David à la déportation de Babylone, 14 générations ; de la déportation de Babylone au Christ, 14 générations ». Voilà qui est impossible. En effet, Matthieu se borne à citer trois noms pour couvrir les 430 ans d’esclavage en Égypte et ne signale que deux ascendants pour combler l’intervalle de trois siècles entre Salomon et Jessé. C’est qu’à dessein, il compose artificiellement ces listes, afin qu’elles se limitent à 14 générations, car 14 est le nombre gématrique du roi David (d=4 + v=6 + d=4 = 14). Et comme on espérait que le Messie serait un descendant de David, l’évangéliste veut démontrer que Jésus est, en quelque sorte, le triple David et donc, le Messie dans sa plénitude, véritable descendant du Roi-Prophète.

Le jeu biblique de gématrie le plus célèbre est celui que l’on trouve dans l’Apocalypse, concernant le chiffre 666, qui est censé désigner la Bête. L’auteur affirme qu’il s’agit là d’un chiffre d’homme. Celui qui se cache derrière ce chiffre n’est autre que l’empereur Néron. En effet, si nous transcrivons : n=50 + r=200 + w=6 + n=50 + q=100 + s=60 + r=200 = 666.

Aucun chrétien ne trouve étrange que la Parole de Dieu se soit faite homme en la personne de Jésus. Moins encore s’étonne-t-il de ce que Jésus ait vécu en homme de son temps. Au contraire, il trouve normal de se le représenter vêtu d’une tunique, comme on en portait au Ier siècle, mangeant les aliments communs à cette époque et utilisant les moyens techniques et de déplacement dont on disposait alors.

Par contre, beaucoup ont peine à admettre que la Bible, qui est aussi la Parole de Dieu, se soit incarnée, si l’on peut dire, dans la culture et la langue du moment.  Ils s’imaginent qu’elle parle comme nous, avec nos expressions et notre mentalité. En fait, il n’en est rien. De même que le Christ est apparu comme un homme d’il y a 2000 ans, ainsi la Bible s’exprime comme les gens d’il y a 2000 ans. S’il serait ridicule de se représenter un Jésus en veston et cravate, circulant en taxi dans Jérusalem et transmettant ses messages par la radio, il ne l’est pas moins d’interpréter la Bible de manière littérale, selon nos catégories mentales, comme le font bien des gens. Nous devons nous situer dans la mentalité et la culture des Juifs de l’époque.

     En conséquence, lorsque en lisant la Bible, nous nous trouvons en face de chiffres ou de nombres, il convient de nous demander s’ils représentent une quantité, ou s’ils ont une signification symbolique ou gématrique. Cela nous permettra de mieux saisir le sens de la Parole de Dieu et, en même temps, le message qu’elle recèle, et qui peut enrichir notre propre vie.

Jérôme Martineau

Q/R-Transmission du péché originel

Nous répondrons à cette question en citant le Catéchisme de l’Eglise Catholique :

404- Comment le péché d’Adam est-il devenu le péché de tous ses descendants ?

Tout le genre humain est en Adam  » comme l’unique corps d’un homme unique  » (S. Thomas d’A., mal. 4, 1) Par cette  » unité du genre humain  » tous les hommes sont impliqués dans le péché d’Adam, comme tous sont impliqués dans la justice du Christ. Cependant, la transmission du péché originel est un mystère que nous ne pouvons pas comprendre pleinement. Mais nous savons par la Révélation qu’Adam avait reçu la sainteté et la justice originelles non pas pour lui seul, mais pour toute la nature humaine : en cédant au tentateur, Adam et Eve commettent un péché personnel, mais ce péché affecte la nature humaine qu’ils vont transmettre dans un état déchu (cf. Cc. Trente : DS 1511-1512).

C’est un péché qui sera transmis par propagation à toute l’humanité, c’est-à-dire par la transmission d’une nature humaine privée de la sainteté et de la justice originelles. Et c’est pourquoi le péché originel est appelé  » péché  » de façon analogique : c’est un péché  » contracté  » et non pas  » commis « , un état et non pas un acte.

 

405- Quoique propre à chacun (cf. Cc. Trente : DS 1513), le péché originel n’a, en aucun descendant d’Adam, un caractère de faute personnelle. C’est la privation de la sainteté et de la justice originelles, mais la nature humaine n’est pas totalement corrompue : elle est blessée dans ses propres forces naturelles, soumise à l’ignorance, à la souffrance et à l’empire de la mort, et inclinée au péché (cette inclination au mal est appelée  » concupiscence « ).

Le Baptême, en donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et retourne l’homme vers Dieu, mais les conséquences pour la nature, affaiblie et inclinée au mal, persistent dans l’homme et l’appellent au combat spirituel.

 

Q/R-D’où vient la femme de Caïn ?

Voilà une question pertinente, car en effet, si Caïn et Abel étaient les deux seuls enfants du premier couple, d’où peut bien sortir l’épouse de Caïn ?

Si l’auteur biblique inclut de tels propos dans son récit, c’est précisément pour éviter que nous en fassions une interprétation trop littérale.

Les premiers chapitres du livre de la Genèse ne nous proposent pas un récit historique de l’acte créateur. Par définition, il ne peut y avoir de témoin de la création !

Les deux premiers chapitres nous parlent  du projet que Dieu portait dans son cœur en créant le monde, de la place et de la mission de l’homme au sein de la création, du rapport que Dieu voulait entretenir avec lui.

Le troisième chapitre nous « raconte » comment l’homme, créé libre, s’est laissé séduire par le rêve d’une autonomie absolue, et s’est séparé de Dieu. La suite jusqu’au chapitre 11 et l’appel d’Abraham, met en scène, de manière imagée, les conséquences de ce péché dit « originel »: la relation faussée de l’homme avec lui-même, les autres, et la création tout entière.

En insérant dans son récit des personnages dont on se demande bien d’où ils sortent, l’hagiographe veut nous faire comprendre que les onze premiers chapitres du livre de la Genèse nous concernent tout autant qu’Adam et Eve, prototypes de toute humanité.

Comme nos « premiers parents » nous sommes créés libres, appelés à cheminer de l’image à la ressemblance du Dieu d’amour ; mais tout comme eux nous sommes exposés à la tentation de l’autonomie, de l’affirmation de notre volonté propre, de l’oubli de Dieu.

Certes notre responsabilité est sans doute moindre vu que nous héritons d’une nature marquée par les conséquences du péché de nos premiers parents (je reviendrai sur ce point dans une autre réponse), mais nous restons néanmoins libres et appelés à résister à la tentation de la suffisance orgueilleuse, pour conduire notre vie en synergie avec la grâce divine, car « les dons gratuits de Dieu et son appel sont sans repentance » (Rm 11,29).

 

Q/R-Que signifie « Que ton Nom soit sanctifié » ?

Commençons par préciser que le Nom représente la Personne – ici : la Personne de Dieu notre Père.

Ensuite, la forme verbale est un « passif divin », que nous pourrions  traduire : « Père, sanctifie ton Nom ». Ce qui signifie : Père, manifeste la sainteté de ton Nom, c’est-à-dire de ta Personne. Seul Dieu en effet peut révéler le mystère de son Être que suggère le terme « Kadosch », « Saint ».

La suite de la prière ajoute : « sur la terre comme au ciel« . Autrement dit : manifeste, révèle ta sainteté parmi nous, au cœur de nos vies, comme elle est manifestée aux habitants du ciel ; réalise pour nous ce que tu as promis par la voix de ton prophète Ezéchiel :

Ez 36, 20-28 : « Dans les nations où ils sont allés, ils ont profané mon saint nom, car on disait : “C’est le peuple du Seigneur, et ils sont sortis de son pays !” Mais j’ai voulu épargner mon saint nom, que les gens d’Israël avaient profané dans les nations où ils sont allés. Eh bien ! tu diras à la maison d’Israël : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Ce n’est pas pour vous que je vais agir, maison d’Israël, mais c’est pour mon saint nom que vous avez profané dans les nations où vous êtes allés. Je sanctifierai mon grand nom, profané parmi les nations, mon nom que vous avez profané au milieu d’elles. Alors les nations sauront que Je suis le Seigneur – oracle du Seigneur Dieu – quand par vous je manifesterai ma sainteté à leurs yeux. Je vous prendrai du milieu des nations, je vous rassemblerai de tous les pays, je vous conduirai dans votre terre. Je répandrai sur vous une eau pure, et vous serez purifiés ; de toutes vos souillures, de toutes vos idoles, je vous purifierai. Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. J’ôterai de votre chair le cœur de pierre, je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon esprit, je ferai que vous marchiez selon mes lois, que vous gardiez mes préceptes et leur soyez fidèles. Vous habiterez le pays que j’ai donné à vos pères : vous, vous serez mon peuple, et moi, je serai votre Dieu. »

Par cette demande, « Que ton Nom soit sanctifié« , nous demandons donc à Dieu de nous donner part à sa propre sainteté dans l’Esprit Sanctificateur, que Jésus ressuscité a envoyé d’auprès du Père pour que nous puissions devenir fils dans le Fils, « participants de la nature divine » (2 P 1,4), et qu’ainsi nous puissions rayonner la sainteté de notre Dieu dans toute notre vie :

Mt 5,48 : « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »

1 P 1,16 : « Vous serez saints, car moi, je suis saint. »

Q/R-Que veut dire « Baal » ?

Baal est une divinité païenne (une idole) que les Israélites ont découvertes en entrant en Terre de Canaan (terre promise).

Il s’agit d’une divinité de la fécondité. Comme toutes les divinités de la fécondité, elles sont parèdres (couple de divinités) : le « mâle » est Baal, la « femelle » est Astarté (Ashéra).

Pour attirer la fécondité sur les troupeaux et les champs, on pratiquait la hiérogamie (prostitution sacrée) dans des lieux surélevés réservés à cette activité et reconnaissables de loin à la stèle plantée au sommet des collines.

Voilà pourquoi les prophètes fulminaient contre ceux qui s’approchaient des stèles :

Jr 19, 4-5 : « Ils m’ont abandonné ; ils ont rendu ce lieu méconnaissable ; ils y ont brûlé de l’encens pour d’autres dieux que ni eux, ni leurs pères, ni les rois de Juda n’avaient connus ; ils l’ont rempli du sang des innocents. Ils ont édifié les lieux sacrés du dieu Baal, pour consumer par le feu leurs fils en holocauste à Baal : cela, je ne l’avais pas ordonné, je ne l’avais pas dit, ce n’était pas venu à mon esprit ! »

Dt 23,18 : « Il n’y aura pas de courtisane sacrée parmi les filles d’Israël, ni de prostitué sacré parmi les fils d’Israël. »

2 R 23, 3-7 : « Debout sur l’estrade, le roi Josias conclut l’Alliance en présence du Seigneur. Il s’engageait à suivre le Seigneur en observant ses commandements, ses édits et ses décrets, de tout son cœur et de toute son âme, accomplissant ainsi les paroles de l’Alliance inscrites dans ce livre. Et tout le peuple s’engagea dans l’Alliance. Alors le roi donna l’ordre à Helcias, le grand-prêtre, aux prêtres en second et aux gardiens du seuil de faire sortir du temple du Seigneur tous les objets qui avaient été faits pour Baal, pour Ashéra et pour toute l’armée des cieux ; il les fit brûler en dehors de Jérusalem, dans les champs du Cédron, et on porta leur cendre à Béthel. Il supprima les prêtres indignes que les rois de Juda avaient établis pour brûler de l’encens sur les lieux sacrés des villes de Juda et aux environs de Jérusalem. Il supprima également ceux qui brûlaient de l’encens en l’honneur de Baal, du Soleil, de la Lune, des Constellations et de toute l’armée des cieux. Le Poteau sacré, on le transporta de la maison du Seigneur, hors de Jérusalem, au ravin du Cédron, et on le brûla dans le ravin du Cédron. On le réduisit en poussière et on jeta la poussière dans la fosse commune. Dans la maison du Seigneur, il démolit les lieux où se pratiquait la prostitution sacrée, là où les femmes tissaient pour habiller Ashéra. »

Q/R-Comment comprendre Ex 4, 24-26 ?

Ex 4, 24-26 : « Or, en cours de route, au campement de nuit, le Seigneur rencontra Moïse et chercha à le faire mourir. Cippora, sa femme, prit un silex, coupa le prépuce de son fils, en toucha le sexe de Moïse et dit : “Tu es pour moi un époux de sang”. Alors Dieu s’éloigna de Moïse. Cippora avait parlé d’“époux de sang” à cause des circoncisions. »

La circoncision est le signe de l’alliance que Dieu a conclue avec Abraham :

Gn 17, 9-13 : « Dieu dit à Abraham : “Toi, tu observeras mon alliance, toi et ta descendance après toi, de génération en génération. Et voici l’alliance qui sera observée entre moi et vous, c’est-à-dire toi et ta descendance après toi : tous vos enfants mâles seront circoncis. La chair de votre prépuce sera circoncise, et cela deviendra le signe de l’alliance entre moi et vous. À chaque génération, tous vos enfants mâles âgés de huit jours seront circoncis. Inscrite dans votre chair, mon alliance deviendra une alliance éternelle. »

Bien plus tard, Moïse est né dans le peuple de l’Alliance. A en juger à la remarque de la fille du Pharaon qui le sauve des eaux : « C’est un enfant des hébreux ! » (Ex 2, 5-6), il a été circoncis, comme tous les enfants hébreux.

On sait qu’ensuite Moïse vécu dans diverses traditions culturelles et religieuses : la cour de Pharaon (Ex 2,10), puis la tribu madianite (Ex 2,15s) où il choisit une épouse (Ex 2,21).

Le chapitre 4 nous raconte l’appel de Moïse, chargé par Dieu de délivrer son peuple de la terre d’Egypte (Récit du buisson ardent : Ex 3, 4-10). Après avoir essayé en vain d’échapper à son élection, Moïse accepte et quitte le pays de Madiane pour se rendre en Egypte, accompagné de son épouse Cippora.

Devenu l’émissaire de Dieu en faveur de son peuple, il convenait que Moïse observe pleinement les commandements du Seigneur. Or, comme il avait été séparé de son peuple pendant une longue période et immergé dans d’autres cultures, il avait omis de circoncire son fils, et se trouvait ainsi, lui et sa famille, hors de l’Alliance.

Il est certain qu’il ne faut pas prendre littéralement « le Seigneur chercha à faire mourir Moïse » : ce serait contradictoire avec son élection préalable, et avec la relation intime que Dieu va nouer avec celui qui reste pour la tradition juive le modèle des patriarches et des prophètes. Certes, « quelque chose » doit mourir en Moïse : à savoir les identités d’emprunt, les appartenances religieuses étrangères à l’Alliance, auxquelles il a consenti durant ses pérégrinations. Il faut qu’il revienne au Dieu de ses Pères, qu’il soit tout entier au Seigneur, dans une confiance sans partage, pour que Celui-ci puisse librement agir à travers lui.

Or c’est son épouse qui accomplit à la place de son mari ce qu’il aurait dû faire, en coupant le prépuce de son fils et par le fait même, en réintégrant toute sa famille dans l’Alliance – ce que veut signifier l’expression « époux de sang ».

Que nous apprend ce passage ?

Que nous aussi nous avons à mourir à nos duplicités, à nos doubles appartenances – au monde et à Dieu -, qui empêchent le Seigneur de déployer dans nos vies « la vigueur de sa force » (Ep 6,10).

Nous avons été rachetés gratuitement au prix du Sang que le Fils de Dieu a versé pour nous, « le Sang de l’Alliance nouvelle et éternelle » ; nous avons reçu la véritable circoncision, dont celle dans la chair n’était que la préfiguration :

Rm 2, 28-29 : « Ce n’est pas ce qui est visible qui fait le Juif, ce n’est pas la marque visible dans la chair qui fait la circoncision ; mais c’est ce qui est caché qui fait le Juif : sa circoncision est celle du cœur, selon l’Esprit et non selon la lettre, et sa louange ne vient pas des hommes, mais de Dieu. »

Mais il nous incombe de demeurer dans cette Alliance en ne vivant plus selon la chair, mais dans la nouveauté de l’Esprit :

Rm 6,4 : « Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts. »

 

Q/R-Que signifie « Jésus est le premier des ressuscités » ?

« Être ressuscité », cela signifie vivre dans l’intégralité de notre être (y compris notre corps) de la Vie même de Dieu.

Et comme la Vie de Dieu est éternelle (sans commencement ni fin), cela signifie devenir immortel (ne connaissant plus la mort) par le fait même que nous participons à la Vie de Dieu.

Avant la venue du Christ, et depuis le péché originel, nous ne vivions plus que d’une simple vie naturelle, que nous aurons tous à déposer le jour de notre mort. Mais Jésus est précisément venu pour que nous puissions à nouveau accéder à la grâce, ce qui est un autre mot pour dire : participer à la Vie divine.

Le Verbe de Dieu, vivant de la Vie même de Dieu son Père, a assumé notre humanité mortelle, pour la rendre à nouveau capable d’accueillir la Vie filiale divine que nous avions perdue en nous détournant de Dieu notre Père.

Mais bien sûr, pour que notre humanité soit en état de recevoir cette Vie divine, il fallait qu’elle soit au préalable purifiée du péché, ce que Jésus a réalisé par sa Passion d’amour, nous aimant plus fort que toute la haine du monde qui se déchainait contre lui, et à laquelle nous avons participé par notre péché.

Aussi au matin de Pâque, lorsqu’il sort du tombeau, Jésus ne revient pas comme Lazare à une vie naturelle : il vit dans tout son être, y compris son corps, de la Vie même de Dieu, et ne peut donc plus mourir. Il était de toute éternité uni au Père dans l’Esprit en tant que Verbe ; maintenant il est uni au Père dans l’Esprit en tant que Verbe incarné : la chair assumée, purifiée, sanctifiée, est en quelque sorte entrée dans la Trinité.

Ce qui signifie que Lazare n’est pas « ressuscité », même si nous employons (à tort) ce vocable : il est simplement revenu à la vie naturelle, qu’il devra déposer un jour ou l’autre. Il ressuscitera au dernier Jour, lorsque le Christ viendra accomplir toutes choses, et que la création toute entière deviendra participante de la nature divine, puisque tel est bien le projet de Dieu :

Rm 8, 19-23 : « La création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise au pouvoir du néant, non pas de son plein gré, mais à cause de celui qui l’a livrée à ce pouvoir. Pourtant, elle a gardé l’espérance d’être, elle aussi, libérée de l’esclavage de la dégradation, pour connaître la liberté de la gloire donnée aux enfants de Dieu. Nous le savons bien, la création tout entière gémit, elle passe par les douleurs d’un enfantement qui dure encore. »

Quand le Seigneur dit dans l’Apocalypse : « Voici je fais toutes choses nouvelles » (Ap 21,5), il signifie que par le Christ, il sanctifie la création jusque dans la dimension matérielle ; et cette transformation est si radicale, qu’elle est comparée par Saint Paul à une nouvelle création.

Ainsi le Corps du Christ ressuscité est un Corps « glorieux » ou encore « spirituel » ; c’est le même corps que celui qu’il a reçu de la Vierge Marie, mais pleinement transfiguré par l’Esprit Saint et devenu « spirituel », c’est-à-dire pleinement soumis à l’Esprit.

Pour nous bien sûr, cette sanctification n’est pas achevée, comme le dit Saint Paul :

Rm 8, 23:  « Nous aussi, en nous-mêmes, nous gémissons ; nous avons commencé à recevoir l’Esprit Saint, mais nous attendons notre adoption et la rédemption de notre corps. »

Nous appartenons encore au vieux monde par notre corps matériel, mais nous possédons déjà un corps spirituel. Celui-ci nous a été donné avec la grâce divine au baptême, lorsque nous avons « revêtu le Christ » comme le dit encore Saint Paul :

Ga 3,27 : «  En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ. »

Je cite encore Saint Paul qui introduit le vocable « homme nouveau », opposé à l’homme ancien ou charnel :

Col 3,10 : « Vous vous êtes revêtus de l’homme nouveau qui, pour se conformer à l’image de son Créateur, se renouvelle sans cesse en vue de la pleine connaissance. »

Plutôt que d’une « nouvelle création » (Saint Paul), Saint Jean parle plutôt d’une « nouvelle naissance », d’une « naissance d’en-haut » (Jn 3,3.7), d’une « naissance d’eau et d’Esprit » (Jn 3,5). Mais l’idée est la même : nous participons dès à présent à la Vie du Christ ressuscité, et donc nous sommes déjà ressuscités avec lui et en lui, puisque nous « avons revêtu le Christ » ressuscité pour vivre de sa Vie.

D’où il découle que nous devons vivre selon cette vie nouvelle qui nous a été donnée dans le Christ ressuscité, et qui nous a fait entrer dans le monde nouveau, et non plus selon l’homme ancien, « charnel » qui appartient au vieux monde qui passe :

Col 3, 1-5 : « Si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre. En effet, vous êtes passés par la mort, et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire. Faites donc mourir en vous ce qui n’appartient qu’à la terre : débauche, impureté, passion, désir mauvais, et cette soif de posséder, qui est une idolâtrie. »

Il s’agit de collaborer avec l’Esprit du Christ ressuscité, lui qui est notre Vie nouvelle, pour nous affranchir toujours plus des comportements anciens dont le Jésus nous a purifiés par sa Rédemption, pour adopter le comportement de l’homme nouveau, recrée ou régénéré dans le Christ ressuscité :

Rm 12, 1-2 : « Je vous exhorte donc, frères, par la tendresse de Dieu, à lui présenter votre corps – votre personne tout entière –, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu : c’est là, pour vous, la juste manière de lui rendre un culte. Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait. »

Beau programme à réaliser avec l’aide de la grâce :

1 Th 5,24 : «  Il est fidèle, Celui qui vous appelle : tout cela, il le fera.»