Le mois de janvier est traditionnellement la période des rétrospectives et des relectures, suivies normalement des bonnes résolutions pour l’année nouvelle. Faire le bilan de nos vies ne consiste pas à nous plaindre en accusant le sort, Dieu ou le gouvernement, de nos échecs. L’exercice n’est fécond que s’il nous conduit à remercier le Seigneur pour tout ce dont il nous a gratifiés, et s’il nous permet de prendre conscience et de regretter sincèrement les moments où – par faiblesse ou par malice – nous n’avons pas vécu l’Évangile. Cette relecture nous conduira, certes, à nous remémorer les malheurs qui nous ont frappés en cours d’année : deuils, maladies, difficultés familiales… ; mais ces événements douloureux ne sont pas des « échecs ». Pour les disciples du Christ que nous voulons être, nos vrais échecs, ce sont nos errances par rapport au chemin que le Christ nous a tracé.
Ce discernement nous fera prendre conscience à quel point nous sommes complices des «structures de péché » (St Jean-Paul II) d’une société qui croit pouvoir (devoir ?) se passer de Dieu. N’est-il pas vrai que dans notre confort de privilégiés, nous oublions facilement ceux qui n’en bénéficient pas, y compris dans notre propre pays ? Il se pourrait bien que l’indifférence soit notre échec « capital » (du latin « caput », tête), c’est-à-dire le péché dont découlent les autres. Indifférence à la détresse des migrants, à la précarité de certains de nos proches, et à tant de situations de solitude que nous côtoyons… Le « chacun pour soi » ne s’est-il pas subtilement insinué dans nos mentalités, étouffant l’interrogation de la Parole de Dieu : « Qu’as-tu fait de ton frère ? » (cf. Gn 4, 9-10).
Ce premier « échec » est étroitement associé à un autre, plus insidieux : la peur. L’année qui vient de s’écouler a été marquée par une flambée de violence et de terrorisme dans le monde, qui engendrent la peur devant l’insécurité croissante, la peur de l’autre, la peur de manquer, la peur de l’avenir – autant de peurs que cherchent précisément à susciter ceux qui sèment la terreur. Or la peur est toujours mauvaise conseillère ; elle incite au repli sur soi, et amplifie par le fait même l’échec précédent : l’indifférence, le refus de partager – fût-ce notre superflu. Pour nous arracher à nos peurs, rien ne vaut la louange et l’action de grâce au souvenir de tous les bienfaits dont le Seigneur nous a comblés. C’est en prenant conscience que Dieu pourvoit largement à nos besoins, que nous accepterons d’être les instruments de sa Providence en faveur des hommes et des femmes qu’il met sur notre route.
Puisse l’année qui commence être riche en gestes de solidarité concrète, comme il convient à des disciples du Christ, enfants d’un même Père, soucieux du bien-être de leurs frères.