Insistons sur ce point : Jésus est le seul homme dans l’histoire qui ait prétendu être l’égal de Dieu, et qui pourtant est mort de la mort la plus humiliante.
Commençons par la prétention de Jésus de Nazareth d’être l’égal de Dieu, son Fils au sens ontologique, c’est-à-dire : partageant la substance divine du Père.
Comme nous le proclamons dans le Credo de Nicée :
« Je crois en un seul Seigneur, Jésus Christ,
le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles :
Il est Dieu, né de Dieu,
lumière, née de la lumière,
vrai Dieu, né du vrai Dieu
Engendré non pas créé,
consubstantiel au Père ;
et par lui tout a été fait. »
Cette affirmation de foi s’appuie bien sûr sur la Révélation, c’est-à-dire sur la Bonne Nouvelle (traduction du terme grec « Évangile ») qui fut rédigée…
« …d’après ce que nous ont transmis ceux qui, dès le commencement, furent témoins oculaires et serviteurs de la Parole » (Lc 1,2).
C’est d’abord à l’écoute des paroles que Jésus a prononcées tout au long de son ministère, que nous découvrons cette prétention – scandaleuse pour des oreilles juives, pour lesquelles il est impossible que le Dieu transcendant s’incarne dans notre humanité pècheresse. Citons-en quelques-unes :
Jn 10,30 : « Le Père et moi nous sommes un. »
Jn 14,10 : « Qui m’a vu à vu le Père. »
Jn 8,58 : « En vérité, en vérité je vous le dis : avant qu’Abraham fut, JE SUIS. »
Cette dernière citation est particulièrement évocatrice, car l’expression grecque rendue en français par « Je suis », est la traduction du Tétragramme sacré, c’est-à-dire du Nom de Dieu révélé à Moïse (Ex 3,14). Jésus prétend donc à l’égalité avec Dieu dont il revendique le Nom.
Les Juifs ne s’y sont pas trompés, comme le souligne Saint Jean :
Jn 5,18 : « Les Juifs cherchaient à le tuer, car il disait que Dieu était son propre Père, et il se faisait ainsi l’égal de Dieu. »
Ce sera d’ailleurs le motif de la condamnation à mort de Jésus :
Jn 10,33 : « Ce n’est pas pour une œuvre bonne que nous voulons te lapider, mais c’est pour un blasphème : tu n’es qu’un homme, et tu te fais Dieu. »
Citons également quelques versets des Synoptiques (ce terme désigne les Evangiles de Mathieu, Marc et Luc) :
Mt 11,27 : « Tout m’a été remis par mon Père ; personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler. »
Jésus déclare avoir avec le Père une relation tout à fait unique eu égard à son statut de Fils. Il prétend dès lors à être le seul à connaitre le Père et à pouvoir en parler en « Esprit et vérité » (Jn 4,23).
Le motif de condamnation de Jésus durant son procès est explicité par St Marc :
Mc 14, 61-64 : « Le grand prêtre l’interrogea de nouveau : “Es-tu le Christ, le Fils du Dieu béni ? ” Jésus lui dit : “Je le suis. Et vous verrez le Fils de l’homme siéger à la droite du Tout-Puissant, et venir parmi les nuées du ciel”. » Alors, le grand prêtre déchire ses vêtements et dit : “Pourquoi nous faut-il encore des témoins ? Vous avez entendu le blasphème. Qu’en pensez-vous ? ” Tous prononcèrent qu’il méritait la mort. »
Jésus est condamné parce qu’il s’identifie au mystérieux personnage dont le prophète Daniel a eu la vision :
Dn 7, 13-14 : « Je regardais, au cours des visions de la nuit, et je voyais venir, avec les nuées du ciel, comme un Fils d’homme ; il parvint jusqu’au Vieillard, et on le fit avancer devant lui. Et il lui fut donné domination, gloire et royauté ; tous les peuples, toutes les nations et les gens de toutes langues le servirent. Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et sa royauté, une royauté qui ne sera pas détruite. »
Le « Fils d’homme » est élevé au même rang que Dieu, dont il partage la gloire et la puissance, et donc la divinité.
Cette prétention à la condition divine, Jésus la confirme également dans ses actions : il a autorité sur les éléments de la nature (il impose silence au vent et à la mer déchaînée), il guérit les malades et expulse les démons par une simple parole d’autorité :
Mc 4, 37-39 : « Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : “Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? ” Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : “Silence, tais-toi ! ” Le vent tomba, et il se fit un grand calme. »
Lc 4, 40-41 : « Au coucher du soleil, tous ceux qui avaient des malades atteints de diverses infirmités les lui amenèrent. Et Jésus, imposant les mains à chacun d’eux, les guérissait. Et même des démons sortaient de beaucoup d’entre eux en criant : “C’est toi le Fils de Dieu ! ” Mais Jésus les menaçait et leur interdisait de parler, parce qu’ils savaient, eux, que le Christ, c’était lui. »
Et surtout, Jésus prétend pouvoir pardonner les péchés, ce que Dieu seul peut accomplir :
Mc 2, 5-12 : « Voyant leur foi, Jésus dit au paralysé : “Mon enfant, tes péchés sont pardonnés”. Or, il y avait quelques scribes, assis là, qui raisonnaient en eux-mêmes : “Pourquoi celui-là parle-t-il ainsi ? Il blasphème. Qui donc peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul ? ” Percevant aussitôt dans son esprit les raisonnements qu’ils se faisaient, Jésus leur dit : “ Pourquoi tenez-vous de tels raisonnements ? Qu’est-ce qui est le plus facile ? Dire à ce paralysé : “Tes péchés sont pardonnés”, ou bien lui dire : “Lève-toi, prends ton brancard et marche” ? Eh bien ! Pour que vous sachiez que le Fils de l’homme a autorité pour pardonner les péchés sur la terre… – Jésus s’adressa au paralysé – je te le dis, lève-toi, prends ton brancard, et rentre dans ta maison”. Il se leva, prit aussitôt son brancard, et sortit devant tout le monde. Tous étaient frappés de stupeur et rendaient gloire à Dieu, en disant : “Nous n’avons jamais rien vu de pareil”. »
Prétention inouïe d’être l’égal de Dieu, le Fils unique du Père, qui contraste avec la mort de Jésus sur le gibet d’infamie de la Croix…
Ce sera notre point suivant de méditation.