Ex 4, 24-26 : « Or, en cours de route, au campement de nuit, le Seigneur rencontra Moïse et chercha à le faire mourir. Cippora, sa femme, prit un silex, coupa le prépuce de son fils, en toucha le sexe de Moïse et dit : “Tu es pour moi un époux de sang”. Alors Dieu s’éloigna de Moïse. Cippora avait parlé d’“époux de sang” à cause des circoncisions. »
La circoncision est le signe de l’alliance que Dieu a conclue avec Abraham :
Gn 17, 9-13 : « Dieu dit à Abraham : “Toi, tu observeras mon alliance, toi et ta descendance après toi, de génération en génération. Et voici l’alliance qui sera observée entre moi et vous, c’est-à-dire toi et ta descendance après toi : tous vos enfants mâles seront circoncis. La chair de votre prépuce sera circoncise, et cela deviendra le signe de l’alliance entre moi et vous. À chaque génération, tous vos enfants mâles âgés de huit jours seront circoncis. Inscrite dans votre chair, mon alliance deviendra une alliance éternelle. »
Bien plus tard, Moïse est né dans le peuple de l’Alliance. A en juger à la remarque de la fille du Pharaon qui le sauve des eaux : « C’est un enfant des hébreux ! » (Ex 2, 5-6), il a été circoncis, comme tous les enfants hébreux.
On sait qu’ensuite Moïse vécu dans diverses traditions culturelles et religieuses : la cour de Pharaon (Ex 2,10), puis la tribu madianite (Ex 2,15s) où il choisit une épouse (Ex 2,21).
Le chapitre 4 nous raconte l’appel de Moïse, chargé par Dieu de délivrer son peuple de la terre d’Egypte (Récit du buisson ardent : Ex 3, 4-10). Après avoir essayé en vain d’échapper à son élection, Moïse accepte et quitte le pays de Madiane pour se rendre en Egypte, accompagné de son épouse Cippora.
Devenu l’émissaire de Dieu en faveur de son peuple, il convenait que Moïse observe pleinement les commandements du Seigneur. Or, comme il avait été séparé de son peuple pendant une longue période et immergé dans d’autres cultures, il avait omis de circoncire son fils, et se trouvait ainsi, lui et sa famille, hors de l’Alliance.
Il est certain qu’il ne faut pas prendre littéralement « le Seigneur chercha à faire mourir Moïse » : ce serait contradictoire avec son élection préalable, et avec la relation intime que Dieu va nouer avec celui qui reste pour la tradition juive le modèle des patriarches et des prophètes. Certes, « quelque chose » doit mourir en Moïse : à savoir les identités d’emprunt, les appartenances religieuses étrangères à l’Alliance, auxquelles il a consenti durant ses pérégrinations. Il faut qu’il revienne au Dieu de ses Pères, qu’il soit tout entier au Seigneur, dans une confiance sans partage, pour que Celui-ci puisse librement agir à travers lui.
Or c’est son épouse qui accomplit à la place de son mari ce qu’il aurait dû faire, en coupant le prépuce de son fils et par le fait même, en réintégrant toute sa famille dans l’Alliance – ce que veut signifier l’expression « époux de sang ».
Que nous apprend ce passage ?
Que nous aussi nous avons à mourir à nos duplicités, à nos doubles appartenances – au monde et à Dieu -, qui empêchent le Seigneur de déployer dans nos vies « la vigueur de sa force » (Ep 6,10).
Nous avons été rachetés gratuitement au prix du Sang que le Fils de Dieu a versé pour nous, « le Sang de l’Alliance nouvelle et éternelle » ; nous avons reçu la véritable circoncision, dont celle dans la chair n’était que la préfiguration :
Rm 2, 28-29 : « Ce n’est pas ce qui est visible qui fait le Juif, ce n’est pas la marque visible dans la chair qui fait la circoncision ; mais c’est ce qui est caché qui fait le Juif : sa circoncision est celle du cœur, selon l’Esprit et non selon la lettre, et sa louange ne vient pas des hommes, mais de Dieu. »
Mais il nous incombe de demeurer dans cette Alliance en ne vivant plus selon la chair, mais dans la nouveauté de l’Esprit :
Rm 6,4 : « Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts. »